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Arrêt sur images / Mediapart : en redressement fiscal qu’ils contestent, lancent un appel aux dons

Paris - Publié le vendredi 6 novembre 2015 à  6 h 50 - n° 206048

Les sites d’informations Arrêt sur images (ASI) et Mediapart, contraints de payer des redressements fiscaux de respectivement 4,1 millions et 540 000 euros, ont lancé aux internautes des appels aux dons, pour faire face à ces montants très lourds pour leurs finances. Tous deux se sont auto-appliqués depuis leur création en 2008 un taux de TVA réduit de 2,1 %, au lieu du taux officiel de 19,6 %, estimant que la presse en ligne devait bénéficier du même taux réduit que la presse papier, même si ce n'était pas encore inscrit explicitement dans le code des impôts.
Depuis, la loi a changé validant leur analyse : sous la pression du Syndicat de la presse d’information en ligne (Spiil), dont Edwy Plenel, patron de Mediapart, était et reste l’un des dirigeants, le gouvernement a accepté d’appliquer à la presse en ligne le taux réduit de 2,1 %, voté par le Parlement en février 2014.
Mais pour le fisc, entre 2008 et 2014, les deux sites ont accumulé délibérément les impayés, d’où des redressements déjà notifiés l’an dernier. Leurs recours ayant été récemment rejetés, ils sont maintenant contraints de les payer, même s’ils comptent poursuivre leur bataille juridique.
Ces montants sont très lourds pour ces jeunes sites qui vivent d’abonnements : Mediapart, qui compte plus de 110 000 abonnés, a réalisé en 2014 un chiffre d’affaires de 9 M€ pour un bénéfice d’un million. ASI (26 000 abonnés) n’a, lui, dégagé que 5 500 € de bénéfice annuel pour un chiffre d’affaires de 900 000 € en 2014.

Appel à la solidarité des lecteurs

«  Mediapart va saisir la justice administrative, mais ce recours n'étant pas suspensif, nous sommes dans l’obligation de payer, ce qui nous prive de nos économies […], c’est pourquoi nous en appelons à la solidarité de nos lecteurs », explique le site. Il conteste aussi des pénalités de plus d'1 M€, infligées « comme si nous avions été des fraudeurs ». Le site a appelé ce jeudi les internautes à le soutenir sur la plate-forme « J’Aime L’Info », qui offre une déduction fiscale sur les dons aux sociétés de presse agréées, de 66 % pour les particuliers et de 60 % pour les entreprises. ASI a, lui, lancé ce jeudi matin à la fois une campagne sur la plate-forme participative Ulule, où il s’engage à rembourser les internautes s’il obtient gain de cause, l’autre sur J’Aime L’Info.
En quelques heures, chacun avait déjà recueilli plusieurs dizaines de milliers d’euros : à la mi-journée, Mediapart avait déjà récolté environ 50 000 € et vers 17h, ASI, qui précise qu’il lui manque 140 000 €, avait recueilli 40 000 € sur Ulule et près de 30 000 sur J’Aime L’Info.
Un troisième groupe de presse en ligne, Indigo Publications (Lettre A, PresseNews…), qui a fait le même choix, a lui aussi reçu un redressement, mais ne fera pas d’appel aux dons. « Nous assumons le risque que nous avons pris », a précisé son patron Maurice Botbol, ancien président du Spiil et toujours membre du bureau.
La bataille pour une TVA réduite se déroule aussi au niveau européen. En juillet 2014, la Commission européenne avait lancé une procédure contre le taux réduit décidé par la France, selon elle contraire à la législation européenne. Mais en mai, son président Jean-Claude Juncker a indiqué qu’elle pourrait réformer cette règle en 2016.
Le Spiil a soutenu ce jeudi dans un communiqué ses membres Arrêt sur images, Mediapart et Indigo, les seuls du syndicat (qui compte 148 membres représentant 175 titres) à avoir pris ce risque juridique.

Fin
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