Marché de la SVOD en France : les résultats d’une étude conjointe entre CNC et le CSA
Paris - Publié le lundi 14 mai 2018 à 5 h 50 - n° 257491Frédérique BredinFrédérique Bredin, présidente du CNCCNCCentre national du cinéma et de l’image animée, et Nathalie SonnacNathalie Sonnac, membre du CSACSAConseil supérieur de l'audiovisuel, devenu l'Arcom le 1er janvier 2022, ont présenté samedi 12 mai au Festival de Cannes une étude conjointe sur la vidéo à la demande par abonnement (SVODSVODSubscription Video on Demand - vidéo à la demande par abonnement) en France, lors du grand débat de la SACDSACDSociété des auteurs et compositeurs dramatiques sur le thème « Cinéma et plateformes numériques : je t’aime, moi non plus ? ».
Premier constat, le marché de la SVOD connaît une croissance exponentielle, en hausse de 91 % en 2017 pour atteindre 249 millions d’euros (multiplié par 9 depuis 2012), pour un marché global de la vidéo à environ 1 milliard d’euros, dont la moitié pour la VOD. La France a cependant un taux de pénétration relativement faible (10 %) par rapport à certains de ses voisins européens (40 % pour le Royaume-Uni). Les plateformes qui dominent le marché sont américaines, avec au premier rang, Netflix (3,5 millions d’abonnés en France) et Amazon Prime Video (3 millions).
Des droits pour le monde et pour la durée la plus longue possible
Ces plateformes ont bouleversé la chaîne de la valeur, en augmentant notamment les standards de production, entraînant une inflation des budgets. Le coût par épisode des séries Netflix comme The Get Down (10 M$/8,3 M€) ou House of Cards (4 à 4,5 M$/3,3 à 3,7 M€) est difficilement comparable à celui des séries françaises comme Versailles (2,5 M€) ou Le Bureau des légendes (1,7 M€). Elles ont également transformé le modèle des acquisitions, en prenant des droits pour le monde et pour la durée la plus longue possible, « une stratégie que nous ne connaissions pas en Europe avec les acteurs historiques », a estimé Frédérique Bredin. Elles ont par ailleurs modifié les modes de diffusion, en se centrant sur le consommateur avec une offre gérée par des algorithmes. « On voit que le transfert de la valeur s’est fait de l’amont vers l’aval, ce qui peut être très perturbant pour l’avenir », a ajouté la présidente du CNC.
65 services de SVOD accessibles en France
Le marché est extrêmement concurrentiel. L’étude dénombre 65 services accessibles depuis la France, soit trois fois plus qu’en 2010. Les plateformes qui réussissent sont celles qui disposent des moyens financiers les plus importants pour investir dans les contenus. Nathalie Sonnac a rappelé que Netflix dépensait entre 5 et 7 Md$ (4,1 à 5,8 Md€) dans les contenus chaque année, ainsi que 1 Md$ (830 M€) dans le marketing. Le catalogue de Netflix comptait au moment où l’étude a été réalisée 2 756 titres, soit deux fois plus que les services Canalplay ou SFR Play. Le cinéma est un moteur d’abonnement puisqu’il constitue plus de la moitié des catalogues des services généralistes.
Des pratiques d’exclusivité et de préachat
Autre élément souligné par l’étude, les pratiques d’exclusivité et de préachat, levier de différenciation et d’attractivité, mais facteur de tensions sur le marché de l’acquisition de droits. Le taux d’exclusivité est particulièrement élevé sur Netflix, qui bénéficie également de l’absence de sortie de ses films en salles pour avoir une offre plus récente et donc plus attractive.
Concernant le profil des abonnés, ils sont très exigeants, sur la qualité de la diffusion comme sur la facilité d’utilisation du service. Ils disposent en général d’abonnements à d’autres offres audiovisuelles, pas uniquement de SVOD. L’étude souligne cependant que le téléviseur reste le premier écran de consommation de la vidéo à la demande par abonnement.
Nathalie Sonnac a terminé la présentation de cette étude en estimant que l’arrivée de ces nouvelles plateformes était une opportunité pour les auteurs et les ayants droit, à condition qu’ils soient correctement rémunérés, que les négociations soient équilibrées et qu’il y ait de la transparence sur l’exploitation des œuvres. La transposition de la directive SMASMAServices de médias audiovisuels devra également « être le vecteur pour équilibrer les conditions de la concurrence entre les services et pour donner aux acteurs nationaux la capacité de se développer dans un écosystème équilibré », a-t-elle conclu.
[L’étude complète est à retrouver dans la version enrichie de cet article]