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Analyse - Sélection sorties du mercredi 3 juillet : les enjeux des films choisis par la rédaction

Paris - Publié le mardi 2 juillet 2019 à 15 h 18 - n° 271193

« Satellifax » vous propose à titre de test, chaque mercredi et, en fonction de vos retours et pendant au moins quelques semaines, cette nouvelle rubrique. Nous souhaitons y partager avec vous nos choix cinématographiques parmi les sorties de la semaine, avec un œil de cinéphile qui se veut aussi analyste de notre industrie. Vos commentaires seraient appréciés : commentaires@satellifax.com

Spider-Man : Far From Home, de Jon Watts

Avec : Tom Holland, Jake Gyllenhaal, Samuel L. Jackson, Marisa Tomei, Jon Favreau, Zendaya, Cobie Smulders

Sony Pictures Releasing France - 2h09

 • Le pitch

Après le sauvetage de la moitié de la population mondiale par les Avengers, une génération entière de superhéros a tiré sa révérence. Quand une nouvelle menace se manifeste, Nick Fury ne sait plus vers qui se tourner. Il choisit de contacter le jeune Peter Parker au moment où l’adolescent est sur le point de partir faire le tour de l’Europe avec sa classe. Mais il se pourrait bien que Spider-Man soit désormais le seul espoir de l’humanité.

Les enjeux de ce film

S’il a des allures d’énième film de superhéros qui sort cette année, Spider-Man : Far From Home est en réalité un film charnière pour l’univers cinématographique Marvel (MCU), et donc pour la stratégie des studios impliqués (Disney et, dans le cas présent, Sony). Le film précédent, Avengers : Endgame, était une sorte de baroud d’honneur de la génération ayant initié le MCU et qui faisait ses adieux à la franchise. Peut-on continuer indéfiniment à étendre cette saga sans l’aide d’Iron Man (Robert Downey Jr.), de Captain America (Chris Evans) ou de Natasha Roumanoff (Scarlett Johansson) ? C’est ce défi que Spider-Man : Far From Home doit relever et le film s’applique à faire de Spider-Man (Tom Holland) un héros aussi désinvolte, touchant et spectaculaire qu’Iron Man (Robert Downey Jr.). Pour illustrer le propos, Nick Fury (Samuel L. Jackson) n’hésite d’ailleurs pas à citer Henry IV, de Shakespeare, entre deux scènes de démolition d’une capitale européenne : « Inquiète est la tête qui porte une couronne ! » ; inquiet semble le studio Marvel, et plus encore Disney qui doit offrir à Sony l’opportunité de guider l’univers cinématographique, puisque Spider-Man est la seule ramification de toute cette entreprise qui continue à leur appartenir ! Si le jeune superhéros parvient à se montrer digne de son modèle, Disney ne sera plus aux commandes de ce manège hyper lucratif. L’alternative serait encore plus catastrophique. Si la passation de relais échoue, c’est toute la franchise qui pourrait s’écrouler. Avengers : Endgame est devenu en quelques jours le deuxième plus gros succès de l’histoire du cinéma. L’enjeu est celui d’une poule aux œufs d’or qui ne cesse de pondre depuis onze ans. C’est toute la pression qui pèse sur les épaules du réalisateur Jon Watts et de son amusant Spider-Man : Far From Home, qui plaira sans doute beaucoup aux fans.

Yesterday, de Danny Boyle

Avec : Himesh Patel, Lily James, Ed Sheeran et Kate McKinnon

Universal Pictures International France - 1h56

 • Le pitch 

Le jeune musicien Jack Malik n’arrive pas à percer. Sa fidèle manager et amie d’enfance, Ellie Appleton, croit tout de même en lui, quoi qu’il arrive. Un soir, lors d’une coupure de courant mondiale de quelques secondes, Jack a un accident de vélo. A son réveil, le monde entier semble avoir oublié l’existence… des Beatles. Et si Jack faisait fortune en chantant leurs chansons ?

Les enjeux de ce film

Le réalisateur de Trainspotting et de Slumdog Millionaire s’associe au scénariste de 4 Mariages et un enterrement et de Coup de foudre à Notting Hill pour une comédie romantique sur les Beatles, mais sans aucune image et aucune chanson chantée par le groupe. Mais des références à Oasis et à Harry Potter sont aussi au programme et Ed Sheeran vient jouer son propre rôle. Pour faire plus « british », il n’y manque que Mary Poppins, un pudding et une théière à l’effigie de la Reine ! Pourtant, Danny Boyle s’est affranchi d’un projet au moins aussi anglais pour se consacrer à Yesterday ! C’est en s’éloignant du vingt-cinquième James Bond, qu’il devait réaliser, que cette comédie romantique a pu voir le jour. Drôle de pari dans la carrière d’un cinéaste oscarisé que de renoncer à une des plus grandes franchises du cinéma pour lui préférer une comédie à petit budget. Mais si le scénario de Yesterday fait penser à celui de Jean-Philippe, de Laurent Tuel (où Johnny Hallyday n’était plus Johnny Hallyday), l’enjeu du film est en réalité ailleurs. Il ne s’agit pas d’aller retrouver Paul et Ringo et de les supplier de redevenir les Beatles, mais d’évaluer l’impact de leur musique sur le monde d’aujourd’hui. Ce sujet en or offre la possibilité à Danny Boyle et à Richard Curtis de disserter sur une question fascinante de l’histoire de l’entertainment. Que valent, en 2019, la chanson Yesterday et au-delà, toute l’œuvre des Beatles ?

La réponse est dans le film Yesterday.

So Long, My Son, de Wang Xiaoshuai

Avec Wang Jingchun et Yong Mei

Ad Vitam - 3h05

 • Le pitch

Au début des années 1980, deux couples d’ouvriers travaillant dans la même usine font chacun naître un fils le même jour. Dix ans plus tard, les deux enfants, devenus amis, jouent près d’un barrage. Mais l’un se noie accidentellement. Jusque dans les années 2010, la politique de l’enfant unique empêchera ces familles de faire leur deuil.

Les enjeux de ce film

Les deux interprètes principaux, Wang Jingchun et Yong Mei, ont été récompensés par l’Ours d’argent des meilleurs acteurs au Festival de Berlin. Dans cette longue tragédie signée Wang Xiaoshuai (Shanghai Dreams, Une famille chinoise), quarante ans d’histoire de la Chine sont traversés par des parents qui ne comprennent pas pourquoi ils n’ont plus d’enfant. Le film, raconté pendant trois heures dans le désordre, ne perd pourtant jamais son spectateur. Saluons l’audace du distributeur Ad Vitam de sortir un très long film chinois en début d’été, face aux blockbusters qui monopolisent l’attention.

Et aussi…

Grâce aux Acacias pour Le Pacte, les 6 premiers films de Jim Jarmusch ressortent en salles : Permanent Vacation, Stranger Than Paradise (Caméra d’or à Cannes en 1984), Down by Law, Mystery Train, Night on Earth et Dead Man. On y retrouve, pêle-mêle, Winona Ryder, Johnny Depp, Robert Mitchum, Roberto Benigni, Béatrice Dalle, Joe Strummer, Steve Buscemi, Iggy Pop et Gena Rowlands dans les longs métrages qui ont lancé la carrière du formidable réalisateur de The Dead Don’t Die. On passe du road-movie au western, du noir et blanc à la couleur, de New York à Helsinki dans une décontraction et une nonchalance qui font toute la saveur du cinéma de Jim Jarmusch.

Gauthier Jurgensen

© Universal Pictures International France
© Universal Pictures International France
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